Genèse et Histoire
Enfant Margaret Thatcher (1925-2013) est décrite par ses professeurs comme une élève modèle, travailleuse, sérieuse, bûcheuse, solitaire, au caractère déjà trempé et déterminé. Son père, Alfred Roberts, était pasteur méthodiste, l’une des églises protestantes majoritaires en Angleterre. Chaque dimanche, elle l’a entendu prêcher les droits de Dieu et les devoirs de l‘homme. « Toujours des devoirs, observe Jean-Louis Thiériot auteur d’une biographie, et la miséricorde jamais ou si peu. (…) Elle a tout le temps le mot ‘morale’ à la bouche. Et il y a deux éléments chez elle qui sont essentiels, c’est la morale et la religion » Celle qui est convaincue que l’on peut – voire que l’on doit – s’élever au-dessus de ses origines modestes par l’effort ne reniera jamais son éducation : “je dois absolument tout à mon père”, dit-elle dès le début de sa carrière aux journalistes. « Il lui inculquera le sens du travail… et l’esprit missionnaire”. Toute son éducation a été dans le sens du profil UN, les valeurs reçues viennent de cette dominante. « Nous étions méthodistes et méthodisme veut dire méthode » disait-elle. « Mon père considérait la vie comme une chose très sérieuse. Son leitmotiv était qu’on ne devait jamais rester sans rien faire. » « L’intégrité. Il [ndlr mon père] m’a appris qu’il faut commencer par être certain de ce que l’on croit. Ensuite il faut agir. Il ne faut jamais transiger sur ce qui compte. »
Son ascension politique est rapide : « junior minister » au ministère des Retraites et de l’Assurance sociale en octobre 1961, dans le gouvernement de Harold Macmillan, elle entre au Shadow Cabinet de Ted Heath en octobre 1967, ce qui lui vaut, après la victoire des Tories en juin 1970, de devenir ministre à part entière de l’Éducation et des Sciences dans le cabinet constitué par Heath, jusqu’à ce que celui-ci perde les élections en 1974. Un an plus tard, elle s’empare de la direction du Parti conservateur, à la surprise générale, car jamais une femme, de sa condition en plus, n’avait accédé à cette fonction. Le 3 mai 1979 elle accède au poste de Prime Minister et ce à 53 ans. Elle gouverna jusqu’au 28 novembre 1990.
Devise (je suis en règle donc je suis)
« La vie n’est pas faite de plaisirs, dit-elle, mais de travail et de progrès », belle vision du monde d’un UN. Elle affirme lors de son accession à la tête des Tories que « le redressement devait se faire par le travail, le sacrifice, la loi et l’ordre. » « Elle estime que la loi est sacrée, que c’est le parlement qui décide de la loi, et que dans tous les cas le parlement doit l’emporter sur la rue. »
Lorsqu’elle fut envoyée à Finchley, elle sympathisa avec la communauté juive et notamment son rabbin Immanuel Jacobovitz :  » Margaret appréciait tout particulièrement ses propos sur l’amélioration de soi, sur la nécessité de ne compter que sur soi-même, de s’élever par ses propres moyens, etc. » M. Thiérot ne voit que deux problèmes à Mme Thatcher : sa voix et son absence d’humour. « Se moquer de soi-même est bien la dernière chose qui viendrait à l’esprit de Margaret Thatcher. » 
Orientation (la rigueur morale et les idéaux élevés)
« Margaret Thatcher a donné une dimension morale à sa politique, et c’est ce qui la caractérise le mieux : elle s’est forgée une idéologie politique, une éthique politique même, qui lui montre le chemin, une éthique qui puise davantage ses racines dans sa propre expérience que dans une théorie abstraite. Pour elle, la Renaissance de la Grande Bretagne résultera du retour aux valeurs anciennes, les valeurs victoriennes : ne compter que sur soi, travailler dur, épargner, croire en la famille, être récompensé(e) pour ses efforts. » Elle déclare un jour : « La méthode, c’est l’économie. L’objectif est de changer l’âme. » Elle a effectivement changé l’âme du pays en remettant ses concitoyens au travail.
Compulsion (l’imperfection, la colère)
En 1979, elle avait annoncé que son cabinet serait composé de gens qui pensaient comme elle car elle jugeait qu’elle n’avait pas de temps à perdre en dissensions internes. « Thatcher commençait les réunions du cabinet en exposant son point de vue, à la différence d’autres premiers ministres qui attendaient que chacun ait exprimé son avis avant de se prononcer. Elle s’irritait quand les gens parlaient trop longuement. Si elle n’était pas d’accord avec ce qu’ils disaient, elle les interrompait. Dépourvue de patience et de tact, elle n’hésitait pas à afficher son mépris » Au sommet de Fontainebleau en 1984, elle reste “mauvaise comme un cygne qu’on agace, impeccablement campée dans des tailleurs sombres. Maggie passe son temps à dire non”, rapporte Jean-Louis Thiériot. Mais, celle que certains surnomment également Tina (There Is No Alternative) arrive à ses fins, soutenue par l’opinion publique anglaise : ses adversaires s’alignent, par lassitude…
Mécanisme de défense (la formation réactionnelle)
Lorsqu’en 1975 elle bat Heath au premier tour des élections pour la présidence du parti conservateur, elle déclare : « J’aurai toujours de l’affection pour ce cher Ted. Mais il n’y a guère de place pour les sentiments en politique. » Et puis lorsqu’on lui annonce qu’elle remporte le 2nd tour, les larmes lui viennent et aussitôt elle se reprend « Heureusement c’est une victoire incontestable. Nous avons beaucoup de travail. Il faut s’y mettre, tout de suite. » On mesure là comment elle se contrôle et cherche à maîtriser ses réactions pour présenter le bon comportement.
Elle raconte par ailleurs, avec une force de caractère hors du commun, que dans l’adversité elle s’est endurcie, qu’elle a mis une carapace. « Je sens affluer l’adrénaline quand je les vois se préparer à m’attaquer et que je m’apprête à leur répondre. Je suis là debout et je me dis ‘Allez Maggie’ tu es complètement seule. Il n’y a personne pour t’aider. Et j’aime ça ! » 
Triade infernale (la colère, le perfectionnisme, avoir raison)
Déjà jeune étudiante, ses camarades lui reprochait « de ne pas s’intéresser aux points de vue des autres, de ne jamais leur demander pourquoi ils disaient ce qu’ils disaient, et de ne jamais admettre qu’un autre point de vue que le sien — c’est-à-dire celui du parti Tory — pouvait avoir le moindre intérêt. Dans sa première circonscription d’élue à Dartford, Margaret découvrit qu’elle possédait un grand atout : sa formidable capacité de travail. (…) Et elle possédait déjà le ton qui devait marquer toute sa carrière : celui d’un chevalier en croisade. » Tous ceux qui l’ont approché souligne qu’elle ne concédait que rarement avoir tort et détestait ne pas savoir quelque chose. « A chacune de ses interventions, elle écrasait sous des avalanches de chiffres, de données, de textes de lois ses malheureux adversaires travaillistes qui généralement n’en revenaient pas et n’étaient pas nécessairement capables de lui répondre de façon argumentée. »
Dans le même sens elle fut toujours très dure avec les fameux « civil servant » (haut fonctionnaires anglais) qu’elle reprenait en leur prodiguant des commentaires peu flatteurs et dignes d’une maîtresse d’école obnubilée par un perfectionnisme latent : « Ineptie / Manque de détails / A refaire ! »
Trio vertueux (la patience et la prudence, ce qui est améliorable, faire au mieux)
Le jour où elle sent qu’elle ne pourra plus gouverner, Margaret se retire et laisse la place.  Par ailleurs, il arrivait souvent à Maggie d’être joyeuse. Lâchant le contrôle, elle aimait rire, comme en témoignent de nombreux clichés, notamment celui pris en 1975 en compagnie de Françoise Giroud lors d’une conférence sur les femmes et le pouvoir. Et si elle était réputée pour n’avoir aucun sens de l’humour, il lui arrivait pourtant de rire aux éclats. Son intégration en SEPT ?
Non-verbal
Maggie apparaît souvent comme dure, pressée, raide, tendue, impatiente, agacée, habillée de façon austère et stricte. Elle fut surnommée la « dame de fer » dès 1976 par l’Étoile rouge, l’organe de l’armée soviétique. Elle n’a jamais fait mentir son surnom, montrant même de rares aptitudes pour la lutte, notamment le goût du secret et la détermination solitaire. Loin de s’en offusquer, Margaret Thatcher sut en tirer profit « Sans le faire exprès, écrira-t-elle dans ses Mémoires, les Soviétiques m’élevaient au rang de leur plus grand adversaire en Europe. Ils ne pouvaient me faire de plus beau cadeau. «  
Certains ont été plus loin en la traitant de Churchill en jupon. « La bouche de Marilyn Monroe, disait Mitterrand, mais les yeux de Caligula. » Il disait aussi qu’elle était le seul homme au gouvernement britannique. Elle était aussi appréciée pour sa beauté séductrice et savait en user à bon escient pour obtenir ce qu’elle voulait. Cela était particulièrement vrai dans les relations qu’elles a entretenues avec Reagan et plus tard Gorbatchev.  
Hiérarchie des centres (IEM)
« Je ne suis pas une femme de consensus, mais une femme de conviction ». Le consensus disait-elle c’est  « ce que personne ne croit, mais que personne ne rejette. » Jean-Louis Thiériot dit que « son idéal, ce sera la virilité politique, les vertus mâles, voire guerrières ». Ces assertions manifestent le caractère instinctif de Margaret. 
Un élément marqué du leadership thatchérien est la fermeté des convictions et la vigueur de leur affirmation, même dans des circonstances difficiles : par exemple lors du Congrès du parti conservateur d’octobre 1980, Margaret Thatcher répondit à ceux qui la pressaient de modifier sa politique économique, « vous ferez demi-tour si vous le voulez. La Dame [de Fer] ne fait jamais demi-tour » (You’ll turn if you want to. The Lady is not for turning). 
Autre choix affirmé, celui de reconquérir par la force les Malouines, envahies par les Argentins en avril 1982, au lieu d’attendre un éventuel règlement de la crise par l’ONU. Dans son échange avec Mme Gould sur le sujet, elle répète en boucle deux phrases : « It was a danger to our ship » ; « My duty was to… ».  Elle-même avait l’habitude de distinguer entre les dries (durs) et les wets (mous), c’est-à-dire ses partisans et ceux qui étaient plus timorés, et de ne compter que sur les premiers. Son côté binaire ressort ici nettement. Cela pourrait même faire penser à un profil HUIT ici.
Invitée à Paris en 1989 pour les fêtes du bicentenaire de la Révolution française, elle a eu la politesse de se taire. Mais, dans ses Mémoires, elle écrira ; « Pour moi qui appartiens à un courant dont le père, Edmund Burke, fut le premier critique perspicace de la Révolution, les événements de 1789 représentent une perpétuelle illusion de la politique. La Révolution française était une tentative utopique de renverser l’ordre traditionnel … au nom d’idées abstraites, formulées par des intellectuels vaniteux, qui échoua dans les purges, les meurtres de masse et la guerre. » Sous bien des aspects, elle anticipait la bien plus terrible révolution bolchevique de 1917. Évoquant quelques années plus tôt dans un entretien au Monde la devise de la République française  » Liberté, Égalité, Fraternité  » elle disait déjà : « Je crois qu’on a oublié les devoirs et obligations dans cette devise. » Remarquons qu’elle méprise au passage les intellectuels. Elle préférera toujours le pragmatisme au théorique.
Il y a peu de peur chez Margaret et son expression renvoie parfois de la tristesse. Cette lettre inédite de son ministre de la Défense au moment de la guerre des Malouines peut surprendre : « C’est devenu inexcusable de dire cela de nos jours mais je vous admire en tant que femme, votre beauté, votre charme et votre distinction m’ont toujours attiré, en tant qu’homme », a continué le ministre, visiblement conquis. « Je pense que votre approche émotionnelle, instinctive et non pragmatique – si peu masculine – de la plupart des dossiers constitue le secret de votre succès dans un monde politique dominé par les hommes », ajouta John Nott, signant d’un « Love – John » sa lettre qui apporte un contraste saisissant aux adjectifs communément utilisés pour qualifier la Dame de Fer. 
Citons encore ces propos à son sujet. « Au Parlement, la « Très honorable Lady » pourfend le gouvernement Callaghan et apprend à encaisser les coups. Elle est vulnérable, et parfois émotive, sensible aux attaques personnelles, qu’elle décoche elle aussi. Dans la ferveur, elle contrôle mal ses impatiences. Elle rabroue, vexe, humilie parfois. Elle s’est un jour comparée à l’ourse de Kipling, « plus dangereuse que le mâle de son espèce ». Elle porte des jugements péremptoires : « Je me fais une opinion sur les gens en dix secondes, et il est très rare que j’en change. » 
Un autre épisode lors de la guerre des Malouine laisse entrevoir la présence de son centre émotionnel. Alors que Carrington est contraint démissionner, Catherine Cullen note que « Thatcher qui l’aimait bien et comptait sur ses conseils, essaya de le garder mais en vain. »  Mais l’épisode qui laisse entrevoir le plus son côté émotionnel est le moment où après avoir décidé de se retirer en 1990 pour laisser plus de chance à son parti de remporter les élections tant la situation s’était tendue, notamment avec l’affaire des poll taxes, elle est accueillie au Parlement et une consœur lui témoigne affection et reconnaissance. Alors Maggie exprima combien elle était touchée, laissant parler son cœur.
La hiérarchie des centres se confirme ici : manifestement instinctive en premier et émotionnelle en second, le mental est quand à lui rejeté. L’hypothèse la plus sérieuse semble donc pencher pour la variante α du profil UN.

  • Bon nombre de citations sont issues de l’excellente biographie de Catherine Cullen – Margaret Thatcher une dame de fer, paru en 1991 aux éditions Odile Jacob.